ONE RUSTY BAND

SOIF DE LIBERTÉ

ENTREVUE: ARNO JAFFRÉ - PHOTO: JIMMY METTIER

White Stripes, Black Keys, Black Diamond Heavy aux Etats Unis, Dirty Deep, The Blue Butter Pot et The Inspector Cluzo dans l'hexagone, le néo blues rock en formule post garage est devenu une discipline pratiquée par d'innombrables formations adoptant une approche roots baignant presque toujours dans la distorsion. Au point qu'il est devenu difficile de se distinguer au sein de cette cohorte. C'est pourtant ce à quoi parvient One Rusty Band, leur troisième album, fraichement sorti, a été enregistré dans des conditions live dans leur Home studio en Bretagne. Entretien avec un duo explosif.

Votre troisième album est sorti en juin dernier et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a fait l’unanimité. Cela doit être réconfortant pour vous après tant d’efforts ?

Greg : Nous sommes hyper heureux qu’il soit sorti car c’est l’accomplissement de presque deux ans de travail, de l’écriture à la réalisation n dans dans notre notre home home studio ! Ça fait du bien de le lâcher et de voir que les gens prennent autant de plaisir à l’écouter que l’on en a eu à le créer.

Léa : C’est effectivement hyper réconfortant. C’est par ailleurs super de se dire qu’il ne nous appartient plus et que chacun, chacune peut se l’approprier. La création, c’est beaucoup tourner autour de son nombril. Du coup, c’est chouette de sortir de ça et de partager. Pour nous, un album c’est avant tout une carte de visite pour partir sur la route faire des concerts et des rencontres !

Line After Line signifie « ligne après ligne », pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Greg: C’est une métaphore de plusieurs choses. Tout d’abord les lignes blanches de la route. En effet, ces trois dernières années, on a eu la chance de beaucoup tourner et donc, de passer pas mal de temps dans la camionnette à regarder ces lignes défiler derrière la fenêtre. C’est aussi toutes ces lignes de mots, ces paroles, dans des des carnets et sur des feuilles volantes qui, petit à petit, se transforment en chansons.

Léa: Cette notion représente aussi tout le bazar de câbles que l’on déroule soir après soir. Nous sommes deux sur scène mais on a plus de câbles, pour brancher notre matériel, qu’un groupe de cinq membres ! Nous avons souvent l’impression de nous emmêler dedans. En résumé, « ligne après ligne » ça veut dire « kilomètre après kilomètre », « chanson après chanson », « montage de scène après montage de scène », « concert après concert »… La tournée quoi ! Pas d’histoire de drogue dans ce titre même si certain.e.s y ont pensé ! Pour nous, c’est plutôt road, paquet de chips and rock’n’roll!

J’ai entendu des riffs « empruntés » à Billy Gibbons (ZZ Top), Brian Setzer (The Strav Cats), John Fogerty (Creedence Clearwater Revival) ou bien à Paul Personne. Ce sont des musiciens qui font partie de vos références ?

Greg : En effet, j’ai été biberonné dès mon plus jeune âge à ces musiciens que mes parents écoutaient. Ensuite, j’en ai découvert d’autres à travers leur collection de vinyles comme Jimi Hendrix, Led Zeppelin, Deep Purple…
Léa: On est aussi pas mal inspirés par des musicien.ne.s plus actuel.le.s comme Seasick Steeve, The White Stripes, Jack White ou encore The Record Company. On écoute plein de groupes français dont Dirty Deep, The Blue Butter Pot, Last Train, The Bloyet Brothers, MADAM, The Dynamite Shakers… Sur la route, pour adoucir les oreilles, on est plus soul, des années 1960 à maintenant. On adore aussi le garage rock et le rock psyché, deux styles qui nous influencent pas mal.

Votre collaboration fait des étincelles… et cela débouche sur un titre comme « I Wanna Kill You ». Vous devriez vous engueuler un plus souvent quand on voit le résultat, non ?

Léa: Hummmm… Non ! C’est trop nul comme sensation quand on s’engueule ! Même si j’adore cette chanson ! Justement, c’est top car à présent on ne s’embrouille plus, on se chante dessus, on danse un petit rock, on bouge les genoux, les coudes, la tête et hop… la crise est est passée !

Vous avez presque à vous seuls réveillé la scène blues-rock en France. Mais d’où vient votre amour pour le blues en général ?

Greg: Mon père jouait de la batterie dans des groupes de blues-rock en amateur et mes premiers souvenirs de musique, en tant que gamin, sont de les voir et les entendre jouer, à fond, en répétitions ou en concerts… Moi aussi je voulais faire du gros son comme eux ! Je voulais faire du rock. C’est bien plus tard que j’ai découvert que les racines du rock étaient le blues: Robert Johnson, Tommy Johnson en passant par Skip James ou Muddy Waters. À travers leur musique, ils racontent leur époque et leur vécu d’afro-américain dans une période esclavagiste et post esclavagiste très dure. Ça a été une grande découverte pour moi les premiers blues électrifiés et le début du rock’n’roll (le rock n’étant finalement que du blues un peu pimenté et accéléré). J’ai découvert une part de l’histoire des États-Unis. C’est C’est de de la là que que découle découle beaucoup de la musique moderne.

« Toutes les alarmes sont activées et nos gouvernements s'en foutent, se bouchent les oreilles. »

Faire autant de bruit à deux, ce n’est pas donné à tout le monde. Comment travaillez-vous cela au quotidien pour être aussi performants ?

Léa: On mange et on dort énormément ! Mais surtout, on répète pas mal car ce projet demande beaucoup physiquement et on a besoin d’être en forme si l’on veut pouvoir jouer correctement.
Greg: Pour la sensation et le gros son d’un groupe de quatre personnes, j’ai créé un chaînage spécial avec mes pédales de guitare.
Léa: Attention moment geekerie!
Greg: Ça donne l’impression qu’il y a une basse et la guitare est passée dans 2 amplis pour avoir une stéréo et un effet mur de son. Je suis un gros geek de par ma formation de technicien son, tout cela m’amuse beaucoup ! Mais comme évoqué plus haut ça fait effectivement beaucoup de câbles !

La situation actuelle de la culture dans notre pays est plutôt alarmante. Comment le vivez- vous sur la route ?

Léa : Malheureusement, la situation ne concerne pas que la culture. Toutes les alarmes sont activées et nos gouvernements s’en foutent, se bouchent les oreilles. À notre petite échelle, sur la route, on a surtout vu les dégâts météorologiques : incendies, inondations, scène emportée par une coulée de boue… Au niveau de la culture, c’est sûr que les coupes budgétaires vont avoir un impact sur la capacité des associations à organiser des évènements. C’est souvent dans la culture que l’on coupe en premier, car elle est soi-disant, moins importante, moins vitale. Alors que lorsque tout part en cacahuète, c’est essentiel d’avoir des espaces où se rencontrer, échanger, partager, voir des choses qui te sortent de ton quotidien et du monde. Heureusement, et on ne les remerciera jamais assez, il y a des personnes, bénévoles, responsables culturels, programmateur.rice.s, acteur.rice.s locaux qui ne lâchent rien et continuent à faire et à créer beaucoup de beaux projets. Merci à eux et à elles!

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